Au creuset des aliénations - 2/ Laïos, l'histoire des pères

 

 

Œdipe Roi, de Sophocle, auteur grec peu enclin à la gaudriole. A qui l'on doit, également Antigone, pièce peu drôle. Les deux font partie du "cycle thébain", qui tire le fil de la malédiction de cette cité par la faute de Laïos, le père d’œdipe. 
 
Freud avec sa partialité habituelle et son goût pour la dissimulation quand ça n'arrangeait pas ses affaires, occulta la raison de la succession de drames qui frappe la famille thébaine.
 
Parce que la faute n'est pas celle d'Oedipe, mais celle du père. 
 
Laïos, en effet, est écarté du trône de Thèbes, et élevé à la cours de roi Pelops . Celui-ci lui confie son jeune fils Chrysippe pour qu'il en fasse un aurige (conducteur de char) compétent. Laïos s'éprend violemment de Chrysippe et le viole. Le jeune garçon, honteux se tue.
 
Alors les dieux maudissent le sang de Laïos en condamnant celui-ci à être tué par son fils, qui épousera aussi sa femme (et donc sa mère : Jocaste).
 
Pour Freud, il est commode de dire que tout relève de "l’œdipe" : la passion réciproque du fils et de sa mère. Ça devait satisfaire le scénario soi-disant très juif de la relation mère-fils et disculper, selon le même scénario culturel, le père, de toute tâche.
 
Le mythe grec dit tout autre chose. Il dit, le coupable c’est le père. Et sa faute se rejoue à chaque génération jusqu'à ce qu'on parvienne à y mettre fin. 
 
Le père en l'occurrence spolie l'enfant dont il a la charge, conduit par sa seule pulsion sexuelle. Désormais un grand classique...
 
Dans Oedipe à Colone, Sophocle suit la tradition mythique, et met fin au cycle thébain et du même coup à la malédiction d'Oedipe. Celui-ci, arrivé à Colone près d'Athènes, guidé par ses filles, mais tourmenté et poursuivi tant par le nouveau roi de Thèbes, Créon, que par son fils Polynice qui veut son aide pour attaquer la ville, repousse ses fils, leur funeste dessein, et ne veut que mourir. C'est Thésée roi d'Athènes qui l'épaulera, le cachera en un lieu secret pour y finir sa vie. Les Dieux élèvent alors Oedipe au rang des héros.
 
Les grecs glorifiaient la retenue, et détestaient la hybris - le débordement dû à l'orgueil, en quoi ils voyaient la source de tous les vices. Les Grecs ont raison, ce sont eux qui l'ont créé ce mythe. Siggy a tort.
 
Son maintien d'Oedipe en coupable, c'est à dire vu seulement sous l'angle moral et sexuel de la faute - et fautif parce que sexuel selon la bigoterie bourgeoise de Freud - rejette absolument la possibilité de l'expiation, de la sublimation même d'une trajectoire que les dieux pourtant, jugent assez favorablement pour élever Oedipe en un domaine où il sera fêté en héros. Héros qui aura clos son destin, et tout assumé.  

Freud, avec cette occultation (et donc cette complaisance à l'égard de la cause réellement première), son paternalisme et son infernal orgueil, est dans la droite lignée de Laïos. La lignée des ogres, des pères, ces salauds.
 

 



 

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