Le journal Courrier international (je n'arrive pas à retrouver l'article parti dans le cyberspace) affirme dans un article que l'IA permet de reconstituer "ce qui s'est passé ce jour-là", en parlant du débarquement en Normandie en 1944 que Robert Capa avait photographié. Elle permet, comme le dit l'article, de rectifier les erreurs ...
Donc on dit qu'une image générée par ia, virtuelle, c'est à dire fausse (puisque non advenue), est plus vraie que les photos de Capa qui se trouvait là ce jour-là ?
Intéressant concept de vérité, décorrélée de la réalité.
L'IA permet, pour la première fois depuis que Parménide (les Grecs et la philosophie pour faire simple) a attaché la vérité à la réalité concrète, de les détacher l'une de l'autre et d'affirmer que la vérité peut n'être pas réelle, pas actualisée dans les faits, pas eu lieu dans la temporalité.
Bravo, nous sommes à la fine pointe du faux. Encore une grande réalisation (irréalisée) du capitalisme et de son idéologie de dématérialisation du monde.
L'IA comme toute technique n'est pas neutre mais procède d'une idée, d'une idéologie, et vise à accomplir un certain travail.
Le capitalisme opère, depuis ses débuts aux 17e, 18e siècles, un travail d'interprétation de la réalité indispensable à la poursuite de ses fins. Rappelons qu'il est une idéologie et non un processus économique normal qui serait devenu incontrôlable.
Donc, au même titre que les religions (instruments de domination et d'interprétation du monde) , le capitalisme vise à organiser la pensée et les représentations dans le sens qui lui convient pour pouvoir agir sur les esprits. Comme tout système de domination.
Que l'IA permette également de dessiner de mignons chatons qui sourient n'enlève pas qu'elle sert d'abord et principalement à remodeler la réalité à des fins de propagande et de contrôle social.
Le problème n'est donc pas que l'IA puisse remplir les trous entre deux photos de Capa mais qu'on affirme que des photos analogiques (des particules chimiques réagissant à la vraie lumière du vrai événement ayant vraiment lieu devant la caméra) permettent d'affirmer que le réel est faux et qu'il faudrait que l'IA se propose de les corriger virtuellement, c'est à dire faussement, pour atteindre le vrai, et que les images produites par incitation d'un ordinateur à qui l'on a fourni des données artificielles soient plus fiables que la caméra de Capa pataugeant à Omaha Beach sous les balles allemandes le 6 juin 44.
Le capitalisme ne cesse de repousser notre exil du monde et de nous en aliéner, faisant se réaliser le fantasme pervers et initial de la Genèse qui nous veut étrangers toujours à ce monde et à cette vie. Étrangers parce que fautifs et exilés, angoissés, et donc vulnérables à l'idéologie parce qu'épouvantés.
L'IA comme instrument de réalisation du faux pervers, comme réalisation de la main de Dieu nous chassant de la réalité.
Quand on se rappelle que le chapitre deux de la Genèse explique que nous fûmes punis pour avoir mangé du fruit permettant de distinguer, de comprendre, de séparer le réel du faux, on mesure en quoi l'IA, instrument du faux permet de fabriquer une réalité inexistante mais impérieuse, plus punitive que la réalité concrète... et de notre propre fabrication
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