Le vrai est un moment du faux

 

 
 

... Comme le rappelait Guy Debord. 
 
Dans un monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux.
 
Parce que la séquence actuelle est celle du faux et du vrai - fake news et vérités alternatives, pastiches ou propagande - c'est la question religieuse qui se pose à nouveau.
 
Parce que l'angoisse est à son comble, de nouveau c'est la tentation religieuse avec son inévitable pendant d'opposer la mienne à la tienne.
 
Tel imam ou exégète ou curé ou rabbin propose une "interprétation" de telle sourate, tel verset, telle écriture : "le sabre est symbolique ", "l'épée est réelle et doit châtier celui-ci et celui-là ", "la punition est dans l'au-delà", 'le châtiment doit tomber maintenant", les termes sont des images, les termes sont des commandements...
 
Et ainsi de suite.
 
Face à la religion et son recours à l'interprétation d'un texte figé une fois pour toutes, généralement par ceux qui y avaient intérêt : Esdras et la Torah, Abu Bakr et le Coran, Paul, puis Saint Augustin, puis le concile de Nicée pour le corpus chrétien, face à un texte figé, décrété depuis un ailleurs et un au-dessus imaginaire, se posant comme vérité, il y a la philosophie.
 
Elle peut se tromper. Elle n'exige pas une lecture herméneutique censée rendre un message occulte, une vérité sous-jacente.
 
Elle peut se tromper, la religion est vraie. Elle propose et discute, la religion impose depuis un critère impérieux et inatteignable. Elle critique et se développe, la religion dit qu'il faut interpréter une parole vraie...
 
Faudrait savoir. 
 
Il est impératif de reprendre la critique totale, fondamentale de la religion. Parce qu'à mesure que le monde s'effondre, ou brûle, il n'est pas exprimé de méthode ou de mobilisation pour y remédier depuis notre humanité, mais un langage de la fatalité ordonnant les humains à se ranger en camps, prêts à faire la guerre pour ne sauver que les tenants de telle ou telle vérité.
 
La religion : les églises s'instituant pour dominer. On foutra la paix aux pygmées, guayaki, et autres tupi guarani. On s'attaquera au système qui dit qu'il est une vérité et fera la chattemitte pour dire qu'il fallait comprendre - interprétation - que le massacre commandé était en fait un symbole, mal compris par des zélateurs.
 
Zélateurs : le terme "religio" contrairement à la vulgate véhiculée par les manuels scolaires paresseux et les francs-maçons de Province (et de Paris) dépasse l'idée de "relier" et trouve son étymologie plus loin que le fameux religare. Il pointe au contraire vers la notion de "scrupule". Le scrupule dans la manière dont on officie, dont on accomplit le rite. Être religieux chez les Romains c'est faire sérieusement les choses du culte, à commencer par celui de la maison - mânes et lares - puis celui qui incombe à prêtres et pontifex...
 
Du scrupule au zèle, s'il y a institution religieuse, il y aura des bûchers.
 
Parmi les discours religieux on se méfiera le plus de ceux qui feignent d'être philosophiques pour néanmoins aboutir à d'impératives vérités sous peine de sévices et se réclamant descendre d'un ciel idéal, d'un au-delà plus réel que le réel : Platon, Kant, Hegel, Heidegger...
 
 

 

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